Fortes de nombreux retours d’expérience, plusieurs organisations des secteurs du bâtiment et du paysage ont mis à jour les Règles professionnelles sur la conception et la réalisation des toitures-terrasses végétalisées. La traditionnalité de ces pratiques est confirmée.
Et de trois. Les toitures-terrasses végétalisées bénéficient depuis le mois de juin dernier d’une nouvelle édition de leurs Règles professionnelles (RP) « pour la conception et la réalisation des terrasses et des toitures végétalisées ». Diffusées pour la première fois en 2002 et mises à jour en 2007, les RP font l’objet d’une troisième édition 2018 rédigée conjointement par la Chambre syndicale française de l’étanchéité (CSFE), l’Association française des toitures et façades végétales (Adivet) et l’Enveloppe métallique du bâtiment (organisation professionnelle des fabricants de panneaux, profils et systèmes). Cinq autres organisations issues du monde du végétal et du bâtiment* ont eu l’occasion d’apporter leurs contributions. « La croissance du marché s’est accélérée à partir de 2008. Aujourd’hui, plus d’un million de mètres carrés de toitures-terrasses végétalisées est mis en oeuvre chaque année. Nous bénéficions donc de nombreux retours d’expérience qui nous ont permis de mettre à jour et de compléter le document existant », explique Philippe Driat, délégué général de la CSFE.
CROISEE DES MONDES
L’objectif étant de proposer un référentiel le plus complet possible, tirant la qualité vers le haut pour éviter au maximum les contre-références. « Nous sommes à la croisée de deux mondes : celui du bâtiment et celui du végétal, poursuit Philippe Driat. C’est pourquoi nous avons fait le choix de Règles professionnelles pédagogiques et autoportantes pour qu’elles restent accessibles à tous les corps de métier. » Elles rappellent néanmoins le principe du lot unique étanchéité + végétalisation dont une entreprise d’étanchéité doit être le titulaire. « Cette répartition se justifie par le fait que les travaux de végétalisation peuvent avoir des conséquences sur la solidité du bâtiment ou sur l’impropriété à destination, à la base du principe de la garantie décennale. Seules les entreprises d’étanchéité disposent des compétences nécessaires pour garantir l’intégrité et le bon fonctionnement des procédés », rappelle le délégué général. Le texte compte une quarantaine de pages de plus que sa version précédente. Afin d’éviter l’effet « usine à gaz » et en faciliter la lecture, la plupart des éléments nouveaux ont été placés en annexes, sous la forme de fiches notamment. La construction rédactionnelle du document reprend autant que possible le plan des NF DTU. Enfin, afin d’en garantir l’accès à tous et d’assurer une diffusion la plus large possible, les RP sont téléchargeables gratuitement sur les sites des organismes signataires ainsi que sur le kiosque étanchéité et bardage de la CSFE (www.kiosqueetancheite- bardage.com)
DOMAINE D’APPLICATION
De manière générale, le texte apporte des éléments complémentaires aux dispositions constructives existantes. Ainsi, le domaine d’application (toitures-terrasses inaccessibles avec élément porteur en béton, béton cellulaire, tôles d’acier nervurées (TAN), bois et panneaux à base de bois, dans le neuf comme en rénovation) a été élargi aux panneaux OSB 3 et OSB 4. Les pentes sont limitées à 20 % en cas de végétalisation extensive et à 5 % pour des végétalisations semi-intensives. « Au-delà, les efforts parallèles à l’élément porteur ne peuvent être quantifiés qu’au cas par cas », souligne Philippe Driat. En outre, contrairement à l’édition précédente, les nouvelles RP ne visent pas le climat de montagne en raison des difficultés à justifier du bon fonctionnement du drainage sous accumulation de neige. L’agriculture urbaine est simplement située au regard des systèmes abordés. Un document dédié est actuellement en cours de rédaction sous l’égide de l’Adivet.
LA RÉNOVATION
Le cas des supports existants fait l’objet de compléments techniques en raison des apports de charges induits par la mise en oeuvre d’une toiture végétalisée. C’est notamment la raison pour laquelle l’apport d’un système de végétalisation est proscrit, sauf à changer l’élément porteur lorsqu’il est en bois (platelage). Pour l’acier, une annexe a été spécialement rédigée (annexe K), rappelant l’ensemble des critères à prendre en compte pour assurer la pérennité et la durabilité de l’ouvrage. Dans tous les cas, « une étude de stabilité générale est requise comme le précise le NF DTU 43.5 pour les éléments porteurs », expliquent les Règles professionnelles. Une attention particulière sera également apportée à la conservation ou la dépose de l’isolant existant, en fonction de sa classe de compressibilité, sachant qu’une classe C est requise.
PROCÉDÉ D’ÉTANCHÉITÉ
La définition des complexes d’étanchéité évolue. La pose en indépendance n’est plus visée, sauf dans le cas de l’asphalte. Il est à noter que certains Avis techniques et DTA dérogent à cette règle pour un système complet (étanchéité + végétalisation) dans le cadre d’un lot unique. Les Règles précisent aussi que l’étanchéité doit présenter un classement FIT I5 suivant le cahier du CSTB n° 2358_V2. Autre nouveauté : le cas de la toiture multi-usages (végétalisation + autre fonction, zone accessible notamment). Le texte préconise notamment que les parties non plantées seront traitées selon les exigences correspondantes des NF DTU de la série 43, « à partir de 1 m au-delà de la zone végétalisée ».
CONCEVOIR LA VÉGÉTALISATION
Côté systèmes de végétalisation, une liste de plantes autorisées (annexe D) offre une base non exhaustive des plantes disponibles pour réaliser le couvert végétal. De la même manière, les espèces proscrites sont listées (annexe E) en raison de « leur développement racinaire qui peut porter atteinte à l’ouvrage d’étanchéité », précisent les RP, comme dans les NF DTU 43.1 et 43.11 pour les terrasses jardins. Enfin, des éléments concernant l’entretien (chapitre 12 et annexe B, voir article p. 24), les opérations d’autocontrôle de la performance des substrats et du drainage… ont été intégrés, tout comme les systèmes de séparation et de retenue des complexes, la réduction de 400 à 200 mm de la largeur de la bande stérile autour des évacuations des eaux pluviales (EEP, chapitre 8), les qualités en matière de gestion des eaux pluviales (annexe C) et l’arrosage (chapitre 11, voir article p.22). Ces nouvelles RP confirment la traditionnalité des pratiques actuelles qui relèvent toujours de la technique courante aux yeux des assureurs. Seule la mise en oeuvre de procédés sous Avis technique permet de pouvoir y déroger