Jean-Éric Fournier est directeur développement durable de Foncière des Régions qui détient un patrimoine immobilier tertiaire total de 17 milliards d'euros (11 milliards d'euros en part du groupe). La stratégie de l'entreprise est notamment axée sur le développement durable. Jean-Eric Fournier pilote ces opérations depuis 2008. La toiture-terrasse constitue pour Foncière des Régions, une opportunité pour faire face à différents enjeux.
Parmi les objectifs en matière de développement durable de Foncière des Régions, la biodiversité prend une place importante. Le traitement des toitures-terrasses, notamment par le biais de la végétalisation, est une piste largement suivie par le groupe pour y parvenir.
ÉTANCHÉITÉ.INFO Foncière des Régions est un groupe reconnu en matière d'éco-performance des bâtiments. Il figure dans les principaux indices comme Euronext Vigeo et fait partie de la « A List » du CDP (Carbon Disclosure Project). Pourquoi mettre en place une telle stratégie de développement durable ?
JEAN-ÉRIC FOURNIER La « valeur verte » d'un immeuble reste aujourd'hui difficilement mesurable. De plus en plus d'études prouvent néanmoins que les performances environnementales, sociales et sociétales d'un bâtiment deviennent des critères implicites de valorisation d'un immeuble. Si vous estimez la valeur d'un ouvrage selon la méthode des cash flow , l'intégration de ces trois dimensions permet de diminuer les travaux d'accompagnement et de mise aux normes, les délais de location et la période de franchise de loyers. Si vous raisonnez en taux de capitalisation, la prime de risque est réduite en raison notamment d'une obsolescence retardée et d'une liquidité accrue. Par conséquent, même à loyer égal, un immeuble vert possède une survaleur attachée à ces caractéristiques.
E.I. Concrètement, comment cela se matérialise-t-il sur le terrain ?
J.-E.F. Aujourd'hui, 58 % de notre parc de bureaux en France est certifié et/ou labellisé (HQE, BREEAM…) pour le bâti et/ou l'exploitation. Notre objectif est d'atteindre 100 % d'immeubles verts d'ici à 2020. La performance énergétique est bien entendu une priorité, et depuis quelques années, nous allons plus loin en plaçant également le bien-être des utilisateurs et la biodiversité au cœur de notre démarche. En effet, cela contribue à augmenter la valeur immatérielle de nos immeubles tout en accroissant le bien-être de leurs occupants. En outre, les certifications commencent à prendre en compte cette valeur immatérielle dans leurs référentiels et de nouveaux labels se créent tel que « BiodiverCity ». Certaines municipalités, comme la mairie de Paris, sont également très actives sur le sujet.
La toiture-terrasse végétalisée (TTV) joue ici un rôle primordial, notamment en zone dense. D'autant plus qu'elle présente d'autres avantages en termes d'isolation, de gestion des eaux pluviales, de réduction des effets d'îlot de chaleur en ville et d'amélioration du confort visuel pour les personnes ayant une vue sur la 5e façade de l'ouvrage.
E.I. Est-ce une disposition constructive que vous cherchez à systématiser ?
J.-E.F. La végétalisation de toiture est un procédé que nous testons depuis 2009 afin d'en analyser les contraintes, le fonctionnement dans la durée, les modalités d'entretien… Depuis 2013, le rythme d'installation de toitures végétalisées sur nos bâtiments s'est accéléré. Actuellement par exemple, sur les six dernières mises en chantier, cinq comportent au moins une TTV.
Au final, nous la mettons en œuvre si l'ouvrage le permet, notamment en rénovation, et si l'environnement n'offre pas de conditions favorables à la biodiversité. Ainsi, si le bâtiment se trouve au milieu d'un parc, la végétalisation de la toiture ne représente pas les mêmes enjeux.
E.I. Quel type de toiture-terrasse végétalisée privilégiez-vous ?
J.-E.F. Cela dépend du contexte. Au regard de notre ambition de faire de chacun de nos sites un levier d'accueil de la faune et de la flore sous des formats riches et variés, nous prioriserons les végétalisations « qualitatives », soit semi-intensives ou intensives. En revanche, lorsque les contraintes techniques nous en empêchent - je pense notamment aux surcharges sur la structure - le tapis de Sedum nous apparaît comme un bon compromis car il permet de respecter les exigences en matière d'urbanisme.
E.I. Dédiez-vous la toiture-terrasse à d'autres usages ?
J.-E.F. Lorsque les terrasses sont accessibles aux usagers, l'accent est mis sur la convivialité et la détente. Ce parti-pris n'exclut en rien la biodiversité, bien au contraire. Par exemple, notre immeuble Respiro, qui accueille le siège social de GTM à Nanterre, a été l'occasion de créer, en partenariat avec le Muséum national d'histoire naturelle, un potager sur l'une des terrasses, qui sera géré par les salariés du groupe.