La mise en œuvre de panneaux photovoltaïques sur les toits-terrasses est rentable.
Le marché du photovoltaïque est dynamique, voire très dynamique. Selon les chiffres publiés en février dernier par l’Observatoire de l’énergie solaire photovoltaïque en France*, près de 2,6 GW ont été raccordées en 2021 pour atteindre en cumulé un peu moins de 12,5 GW. On est encore loin des objectifs de 20,1 GW à fin 2023 et entre 35,1 et 44 GW à fin 2028 mais la tendance n’a jamais été aussi haussière. Les trois derniers mois de l’année ont été particulièrement fastes avec 750 nouveaux MW raccordés contre 632 MW au troisième trimestre. La part d’électricité photovoltaïque dans la consommation brute d’électricité en France a atteint 1,76 % ce même quatrième trimestre 2021.
Si cette croissance est surtout le fait de la forte hausse du segment des grandes centrales (1 MW et plus), les capacités offertes par les toitures-terrasses sont, elles aussi, de plus en plus exploitées. Ainsi, toujours selon l’Observatoire de l’énergie solaire photovoltaïque en France, en cumulé depuis 2009, les toitures moyennes (9-100 kW) comptent pour 2 502 MW du total des raccordements contre 1 961 MW en 2020, les grandes toitures (100-250 kW) pour 1 278 MW (1 172 MW en 2020) et les très grandes toitures (250 kW – 1 MW) pour 372 MW (339 MW en 2020). Aujourd’hui, « les segments « grandes et très grandes toitures » représentent 13 % du volume total raccordé et les segments « résidentiel et moyennes toitures » 34 % », précise l’Observatoire.
« Jamais depuis 15 ans, les perspectives de réalisations de centrales solaires sur toiture-terrasse n’avaient été aussi favorables », se réjouit Jean Damian, directeur de Soprasolar, filiale dédiée au photovoltaïque de l’industriel Soprema. Plusieurs facteurs environnementaux, réglementaires et conjoncturels expliquent cet optimisme. La nécessaire décarbonation de l’énergie pour lutter contre le réchauffement climatique a conduit le législateur à prendre des mesures en faveur des énergies renouvelables. Ainsi la loi Énergie Climat de novembre 2019 a introduit pour la première fois « l’obligation de végétaliser ou d’équiper de dispositifs de production d’énergie renouvelable les nouvelles constructions de plus de 1 000 m2 d’emprise au sol dédiées à une exploitation commerciale, un usage industriel ou artisanal ou au stationnement public couvert, et ceci sur 30 % de la surface de leur toiture ou des ombrières de parking créées ». Cette exigence a depuis été confirmée et même amendée par la loi Climat & Résilience d’août 2021 qui a réduit la surface minimale de la toiture à 500 m².
Arrêté tarifaire
L’autre évolution réglementaire majeure, c’est la publication en octobre 2021 de l’arrêté tarifaire remontant à 500 KWc la puissance des centrales photovoltaïques installées sur bâtiment, hangar et ombrière éligibles à l’obligation d’achat. Ce seuil était auparavant plafonné à 100 kWc. Au-delà, il fallait passer par le processus des appels d’offres, à la fois complexe et sans garantie de sélection. Résultat, « beaucoup de projets sur grandes toitures ne se faisaient pas ou se limitaient volontairement à 100 kWc pour éviter de passer par la case appel d’offres. Ils peuvent désormais être revus à la hausse, explique Mélodie de l’Epine, coordinatrice du pôle photovoltaïque pour l’association Hespul. On devrait assister à une explosion des installations comprises entre 100 et 300 kWc. » « D’un marché presque inexistant, plusieurs centaines de projets sont désormais enregistrées chaque trimestre », confirme Richard Loyen, délégué général d’Enerplan, syndicat de l’énergie solaire renouvelable.
(c) Dome Solar
La réglementation est de plus en plus favorable à l’installation de centrales solaires sur les toits
Rentabilité
Car non seulement les démarches administratives s’allègent mais « ces incitations réglementaires ont accéléré la rentabilité du photovoltaïque », explique Jean Damian. Et ce d’autant plus que, depuis plusieurs mois, le prix de l’énergie n’en finit pas d’augmenter. L’invasion de l’Ukraine par la Russie a encore enfoncé le clou et mis en lumière les avantages d’une production d’électricité au plus près de là où elle sera utilisée. L’autoconsommation avec revente du surplus au réseau entre dans les mœurs en premier lieu pour faire baisser les factures.
Une ombre vient néanmoins ternir le tableau. Comme tant d’autres secteurs d’activité, la filière souffre de la flambée des prix et de la pénurie des matières premières. « Le verre ainsi que les composants nécessaires à la fabrication des onduleurs manquent », rappelle Nicolas Randria, secrétaire général du groupement des métiers du photovoltaïque (GMPV-FFB). Résultat, les coûts de fabrication des modules explosent. On observe des hausses pouvant atteindre 25 %. C’est pour en limiter les impacts sur la filière que le gouvernement a répondu aux attentes des professionnels en gelant, en mai dernier, la baisse des tarifs d’achat de l’électricité pour les nouvelles installations de moins de 500 kWc. En effet, comme le rappelle Richard Loyen, « dans la formule initiale, les pouvoirs publics avaient prévu une baisse de ces tarifs d’achat d’électricité de 5 % par an pour tenir compte de la réduction continue des coûts dans le secteur ».
Si l’initiative a été saluée, l’inquiétude persiste. « De nombreux projets sont mis à l’arrêt faute de matériels, explique Mélodie de l’Epine. La volonté des pouvoirs publics et des maîtres d’ouvrage est réelle, les carnets de commandes sont pleins, les technologies et leur système d’intégration au bâti sont performants. Pourtant, nous commençons à entendre parler de chômage technique. Les ambitions pour 2022 vont clairement devoir être revues à la baisse. »
* France territoire solaire, Observatoire de l’énergie solaire photovoltaïque en France, quatrième trimestre 2021.
Dossier réalisé par Adeline Dionisi :
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