Après des mois de discussions et l’intégration d’un premier amendement dans le NF DTU 43.3, le traitement de la perméabilité à l’air des toitures acier par le recours au pare-vapeur semble désormais faire consensus. Prochaine étape : la révision complète du référentiel pour définir les conditions de son utilisation.

L’évolution de la réglementation thermique et des mentalités des maîtres d’ouvrage pousse au durcissement généralisé des exigences de performance énergétique des bâtiments. L’enveloppe doit, de plus en plus, afficher des niveaux importants en matière d’isolation  mais aussi d’étanchéité à l’air. Si ces contraintes sont connues et maîtrisées pour les bâtiments en béton ou en bois, elles le sont moins pour les bâtiments en acier qui ont longtemps pâti de leur destination : stockage, logistique, industriel… Ces usages demandent peu ou pas de chauffage et sont par conséquent peu regardants quant aux performances énergétiques de l’enveloppe. Résultat, « leur conception est optimisée économiquement », souligne Denis Lehnen, directeur technique pour Soprema Entreprises.

La donne change depuis que l’acier n’est plus réservé aux « boîtes à chaussures » et se démocratise au sein des immeubles tertiaires et même de logements. Des ouvrages qui, cette fois-ci, sont non seulement chauffés mais en plus soumis à la réglementation thermique et à la concurrence induite par les labels. La performance énergétique devient un objectif incontournable. Pour le remplir, les bâtiments s’isolent et se ferment. Problème : les indicateurs de ces « thermos » passent au vert grâce à des dispositions constructives pouvant également être source de désordre. C’est particulièrement le cas avec la perméabilité à l’air dont le traitement implique une réduction significative de la ventilation naturelle de l’ouvrage. Sans l’intégration d’un équipement adapté, la différence de pression entre l’intérieur et l’extérieur engendre un phénomène de migration de l’air intérieur qui augmente, de fait, le risque de condensation, notamment au niveau de l’isolant de la toiture en tôles d’acier nervurées (TAN).

Arguments et contre-arguments

Pour traiter l’étanchéité à l’air, les solutions constructives existent mais obtenir un consensus des professionnels du secteur autour d’une position commune n’a pas été chose facile. Les uns étaient favorables à un traitement au droit de la membrane d’étanchéité à l’eau (plus économique). Les autres lui préféraient la pose systématique d’un pare-vapeur, comme c’est déjà le cas avec les éléments porteurs en béton ou en bois, pour gérer à la fois l’étanchéité à l’air et le risque de condensation (plus onéreux). Les arguments et contre-arguments se sont affrontés pendant plusieurs mois, interrompant même les discussions. Finalement « il y a un environ un an, les discours sont devenus plus techniques qu’économiques », précise Denis Lehnen. Le pare-vapeur devrait se généraliser sur tous les bâtiments chauffés.

« Les professionnels ont constaté que lorsque des niveaux élevés d’étanchéité à l’air étaient demandés, l’ajout au complexe d’un pare-vapeur fonctionnait bien », explique Lise Boussert, déléguée technique à la Chambre syndicale française de l’étanchéité (CSFE). Résultat, en novembre 2017, le NF DTU 43.3 relatif à la mise en œuvre des toitures en tôles d’acier nervurées avec revêtement d’étanchéité a été amendé (amendement A1) dans le double objectif d’introduire la mise en œuvre d’un pare-vapeur sur les TAN pleines des locaux à faible et moyenne hygrométrie lorsqu’un certain niveau de perméabilité à l’air est requis (Q4Pa-surf  ≤ 1,4 m3/(h.m²)) et de préciser les conditions de mise en œuvre inhérentes à cette exigence (voir encadré).

Vers une révision profonde du référentiel

Les travaux de révision du NF DTU au regard de cette problématique ne sont pour autant pas achevés. Ils sont même actuellement en cours et devraient aboutir à la validation de deux grands principes : « Le texte ne réfléchira plus en termes de valeur mais de typologies d’ouvrage », souligne Maël Le Faucheur, ingénieur à la CSFE. Sont pour le moment concernés tous les bâtiments à forte et très forte hygrométrie et ceux à moyenne ou faible hygrométrie chauffés, soit les logements individuels et collectifs, les établissements recevant du public et les bureaux.

Le deuxième grand sujet concernera la continuité de l’étanchéité à l’air et du pare-vapeur qui passe par « le raccordement entre toiture et façade aujourd’hui non traité. Ces ouvrages sont indépendants l’un de l’autre avec d’importants mouvements différentiels entre les deux. Le relevé du complexe d’étanchéité est solidaire de la toiture et indépendant de la façade », précise Denis Lehnen. La nouvelle mouture du document devrait donc introduire des solutions fonctionnelles pour garantir  cette continuité de l’étanchéité à l’air et de la fonction pare-vapeur, similaires aux dispositions existantes pour le béton ou  le bois mais « rien n’est encore arrêté à ce jour car elles imposent un raccordement structurel par le charpentier. Les discussions sont en cours

Enfin, les réflexions tournent sur l’attribution des lots et la gestion de l’interface entre les intervenants, condition sine qua non à la bonne exécution de l’ouvrage. Or, « plusieurs corps d’état pourraient être amenés à la prendre en charge : façadier, étancheur… », souligne Christophe Saby, de la direction technique de la société Smac.

Une première approche avec les Recommandations professionnelles

Si rien n’est encore fermement acté, une chose est sûre : contrairement aux habitudes, la révision du référentiel ne va pas introduire des pratiques désormais considérées comme traditionnelles mais au contraire initier de nouveaux comportements et modes constructifs. Une petite révolution pour le secteur. Ils ne seront pour autant pas totalement inconnus lorsque le NF DTU révisé paraîtra, pas avant 2021. En effet, d’ici le début de l’année prochaine seront publiées les Recommandations professionnelles de la CSFE n°8 pour « l'isolation thermique et le traitement de la perméabilité à l’air des toitures avec étanchéité sur TAN ». « À l’origine, elles ne devaient traiter que de l’isolation thermique, rappelle Lise Boussert, déléguée technique de la CSFE. Nous avons finalement également introduit le traitement de la perméabilité à l’air car il n’est, pour le moment, abordé dans aucun autre référentiel. »

Le document confirmera les deux solutions introduites par l’amendement au NF DTU 43.3 à savoir que l’étanchéité à l’air peut être « traitée au droit du pare-vapeur quand il existe ou au droit du plan d’étanchéité à l’eau de la toiture, c’est-à-dire au droit de la membrane d’étanchéité à l’eau en l’absence de pare-vapeur ». Il précise également comment réaliser cette fameuse jonction entre toiture et façade : par le recours à une « équerre de calfeutrement à l’air permettant d’assurer la continuité du traitement de la perméabilité à l’air ». Elle sera définie en fonction du type d’étanchéité (bitumeuse ou synthétique) et mise en œuvre au droit de la membrane d’étanchéité ou du pare-vapeur en fonction de la solution choisie. « Pour chacune d’elle, les RP proposent un schéma explicatif », souligne Lise Boussert. Petit à petit, l’absence de référentiel se comble.

L’amendement A1 du NF DTU 43.3

La nécessité du pare-vapeur est mentionnée au § 5.3 du Cahier des clauses techniques (CCT). L’amendement a enrichi le texte avec l’intégration d’un dispositif pare-vapeur sur les bâtiments à faible ou moyenne hygrométrie avec une toiture en tôles d’acier nervurées pleines, sur tout bâtiment, avec perméabilité à l’air Q4Pa-surf requise ≤ 1,4 m3/(h.m²). Il est également spécifié que ce sont les documents particuliers du marché (DPM) ou la réglementation qui définissent le niveau de perméabilité à l’air requis.

Le texte précise également les caractéristiques du pare-vapeur, basées sur la solution d’écran rapporté décrite dans le NF DTU 43.3 pour les locaux à forte hygrométrie :

- écran rapporté, posé directement sur les TAN ou sur un premier lot d’isolant dans les conditions du 6.4.1, avec un recouvrement de 0,10 m. Les recouvrements sont liaisonnés par pontage, collage ou soudage ;
- écran rapporté constitué de matériaux en feuilles ;
- écran voile de verre-aluminium déroulé parallèlement aux nervures, face aluminium au-dessus avec recouvrement au droit des plages. Les recouvrements transversaux sont réalisés par pontage par bandes rapportées collées ;
- dans le cas de soudage au chalumeau, la compatibilité de la protection en sous-face des tôles d’acier nervurées avec la chaleur apportée par cette technique de mise en œuvre doit être vérifiée.

L’amendement du CCT du NF DTU 43.3 entraîne des modifications des Critères généraux de choix des matériaux (CGM) de la norme, le NF DTU 43.3 P1-2/A1 qui supprime les bandes de pontage auto-adhésives, le collage à l’EAC du pare-vapeur par écran rapporté pour locaux à faible, moyenne et forte hygrométrie et ajoute des bandes adhésives de 50 mm de largeur pour le pontage des lés du pare-vapeur voile de verre-aluminium.

Révision du NF DTU 43.3 : les autres mises à jour à prévoir

Outre l’étanchéité à l’air, la révision du NF DTU 43.3 devrait également apporter des précisions sur :

- le traitement des points singuliers et plus spécifiquement celui des relevés : « Le NF DTU devrait introduire la possibilité de faire le relevé d’étanchéité directement sur la façade béton ou bois, sans mise en place préalable d’une costière », explique Maël Le Faucheur, ingénieur pour la CSFE.
- le dimensionnement selon les Eurocodes et plus selon les règles NV 65 ;
- les TAN grandes portées ;
- les membranes synthétiques PVC-P ;
- le climat de montagne ;
- les départements et régions d’Outre-Mer.

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