Dominique Sutra Del Galy est président de Sogeti Ingénierie et président de la fédération des syndicats des métiers de la prestation intellectuelle du conseil, de l'ingénierie et du numérique (Cinov). Il a débuté sa carrière en 1980 chez Bureau Veritas. En 1996, il rejoint Sogeti Ingénierie en tant que responsable d'activité puis directeur et enfin président. De 2002 à 2008, il est également président du Cinov en Normandie. Il est à la tête de l'organisme au niveau national depuis 2013. .
Au sein d'un bâtiment, la toiture-terrasse est devenue une interface de plus en plus sollicitée. La collaboration et la coordination entre les corps d'état et les différents lots est aujourd'hui indispensable à la réussite d'un projet.
ÉTANCHÉITÉ.INFO Pouvez-vous nous présenter Cinov ?
DOMINIQUE SUTRA DEL GALY Cinov est l'une des deux fédérations (avec Synthec) animatrices de la branche des métiers de la prestation intellectuelle du conseil, de l'ingénierie et du numérique. Cette branche représente 80 000 structures et 800 000 salariés. Notre organisme rassemble 14 syndicats professionnels différents : construction, infrastructure, numérique, ergonomie, acoustique…, et 16 régions administratives.
Notre mission est double. Tout d'abord notre fonction institutionnelle, liée au paritarisme, nous amène à animer le dialogue social et la formation avec les pouvoirs publics et les syndicats salariés. En parallèle, nous travaillons sur la synergie entre les différents métiers en établissant des échanges entre les professionnels. En effet, nous considérons que la maîtrise d'une technicité n'a de sens que si elle s'intègre dans un processus global.
É.I. En quoi cette vision s'avère-t-elle importante pour l'étanchéité ?
D.S.D.G. On peut citer l'isolation des toitures-terrasses. Elle concerne en premier lieu l'efficacité énergétique de l'ouvrage. Mais elle joue également un rôle en matière de sécurité incendie, de performance acoustique… Enfin, en tant que support d'étanchéité, sa mise en œuvre doit répondre à des exigences spécifiques pour garantir la pérennité du système. Nous concentrons nos actions sur la gestion des interconnexions entre tous ces domaines pour prévenir les risques et améliorer la qualité des ouvrages.
É.I. Le BIM va dans le même sens…
D.S.D.G. La maquette numérique est en effet un processus qui optimise la conception, la réalisation et l'exploitation des ouvrages. Elle contribue à prévenir les aléas et à améliorer la qualité et la logique de coût global d'une construction. Elle participe également à la problématique de maintenance patrimoniale tout au long de la durée de vie de l'ouvrage. Mais pour que l'outil soit efficace, chaque élément de la maquette doit être précisément renseigné. Un rôle qui incombe aux industriels, qui fournissent les hypothèses de base et aux entreprises qui intègrent les données produits.
É.I. La conception d'une toiture-terrasse doit également intégrer ce principe.
D.S.D.G. Il y a une trentaine d'années, personne ne montait sur une toiture-terrasse. Aujourd'hui, on observe le mouvement inverse : l'ouvrage est de plus en plus fréquenté. Il peut s'agir de visites périodiques justifiées par l'entretien et la maintenance ou par l'accessibilité au public. Cette caractéristique entraîne de nouvelles contraintes. Il s'agit par exemple de la mise en œuvre de garde-corps adaptés, de la prise en compte de charges supplémentaires dans les calculs de résistance structurelle… Autant de problématiques qui demandent d'intégrer des notions qui vont au-delà de la définition d'un complexe d'étanchéité tout en y étant étroitement connectées. Pourtant, cette logique n'est pas toujours suivie et les contraintes d'exploitation non prises en compte peuvent être la source de sinistre.
É.I. Qui prend en charge ces interfaces entre les différents postes ?
D.S.D.G. En collaboration avec l'architecte, le bureau d'études définit les principes constructifs en fonction des contraintes réglementaires, urbanistiques, de sécurité… Les entreprises ont ensuite la possibilité de proposer des variantes. Certains détails techniques tels que la gestion des joints de dilatation, les liaisons toiture/façade ou encore le positionnement des évacuations d'eaux pluviales relèvent de l'ingénierie. Cela suppose évidemment de posséder une bonne connaissance des systèmes mais aussi d'insister sur le travail de collaboration avec les autres lots. C'est le cas notamment lorsque des équipements (ventilation…) sont installés sur la toiture-terrasse. Pour certains choix architecturaux ou techniques, il est parfois nécessaire de concevoir d'abord les éléments de la toiture avant d'avancer sur les autres principes constructifs ou à l'inverse, d'intégrer l'ensemble des contraintes techniques avant toute conception du toit-terrasse. Dans tous les cas, la gestion de l'interface entre tous les lots est primordiale pour la bonne conception d'un projet.
É.I. Faut-il faire appel à des bureaux d'études spécialisés dans chaque domaine ?
D.S.D.G. Sur la plupart des chantiers, un bureau d'études « tous corps d'état » est en mesure de résoudre les cas de figure courants. En revanche, sur des projets d'envergure ou présentant des spécificités techniques pointues, un bureau d'études spécialisé prendra le relais. Dans tous les cas, ces structures sont qualifiées pour gérer la synergie entre les lots.
É.I. Les maîtres d'ouvrage entendent-ils suffisamment ce discours ?
D.S.D.G. La maîtrise d'ouvrage publique est plus sensibilisée à la notion de coût global que les acteurs privés. L'exemple vient surtout de l'habitat social, bien plus actif pour prévenir, anticiper et optimiser à la fois le prix et la qualité du projet.