L'examen visuel de l'ensemble de la toiture constitue la première étape des opérations d'entretien.
L’entretien des toitures-terrasses : la clé de la durabilité
La conception et la mise en œuvre d’une toiture-terrasse réalisée dans le respect des référentiels en vigueur garantissent la qualité de l’ouvrage à réception. Sa durabilité, en revanche, dépendra de son entretien. Les règles sont décrites dans les documents applicables aux différentes typologies de toitures (inaccessible, technique, accessible piétons et / ou véhicules, végétalisée, jardin, photovoltaïque…) : annexes A des DTU de la série 43, paragraphes dédiés dans les différentes Règles professionnelles, Avis techniques des procédés… L’Agence qualité construction (AQC) met également à disposition sur son site une fiche spécifique à l’entretien des toitures-terrasses (https://qualiteconstruction.com/fiche/entretien-maintenance-toitures-terrasses). Car, si ces opérations ne sont pas réalisées correctement, les dommages peuvent être lourds de conséquences. Surtout s’ils affectent la capacité de fonctionnement de l’ouvrage : les réparations coûtent très cher. Le premier enjeu donc est économique. Un entretien régulier permet de maîtriser les coûts et de conserver une valeur stable du bâti, voire de le valoriser. La logique est la même pour les installations, les équipements et les performances d’un ouvrage qui, en plus, reste sain et confortable pour ses usagers.
Responsabilités
Mais en cas de sinistre généré par un défaut d’entretien, qui endosse la responsabilité ? « L’assureur n’est pas tenu de le garantir », répond Stéphane Orsetti, responsable prévention construction à la SMABTP, qui cite l’annexe II de l’article A243-1 modifié par l’article 16 de l’arrêté du 27 mars 2018 du Code des assurances « clauses-types applicables aux contrats d’assurance dommages-ouvrage ». Elle précise que la garantie du contrat ne s'applique pas aux dommages résultant notamment des effets de l’usure normale, du défaut d’entretien ou de l’usage anormal de l’ouvrage. Les opérations d’entretien restent néanmoins fortement recommandées dans tous les référentiels. En effet, l’étancheur, en tant qu’entreprise soumise à l’article 1792 du Code civil, est présumé responsable de tout dommage causé à l’ouvrage en relation avec ses travaux. Dans le cadre de son devoir de conseil, il doit donc démontrer qu’un contrat a été proposé et conserver une trace écrite de cette invitation. Il pourra alors être dégagé de sa responsabilité.
Interventions
Les usagers doivent participer à l’entretien. Néanmoins, certains maîtres d’ouvrage, comme les copropriétés et les particuliers, n’ont, la plupart du temps, aucune idée des exigences et de la marche à suivre. C’est notamment pour pallier ce manque que la Chambre syndicale française de l’étanchéité (CSFE) a publié en septembre 2020 un Mémento étanchéité en copropriétés. En revanche, les bailleurs sociaux et autres gestionnaires de parc immobilier ou exploitants de sites industriels disposent de services techniques ou d’entreprises prestataires au fait des protocoles et formés notamment aux règles du travail en hauteur. Si leur intervention est possible, elle reste limitée à la détection visuelle de pathologies et aux opérations simples de nettoyage. Le reste est affaire de spécialistes, que sont les entreprises d’étanchéité.
(c) Smac
L'inspection et l'éventuel reprise des relevés sont une étape clés de l'entretien des toitures-terrasses.
« De manière générale, un spécialiste est toujours tenu pour responsable par rapport à un généraliste, lui-même responsable par rapport au client final réputé non-sachant, précise le responsable prévention construction. L’entreprise doit fournir notamment au maître d’ouvrage le dossier des ouvrages exécutés (DOE) qui compile la nature des matériaux mis en œuvre, le carnet et les notices d’entretien, de garantie… C’est à ce moment-là qu’elle doit également proposer la signature d’un contrat d’entretien. » L’entreprise dépositaire des travaux peut elle-même prendre en charge ce contrat. Certaines y dédient une part importante de leurs activités. Pour inciter et aider les autres à proposer ces services, la CSFE met à disposition de ses adhérents des modèles de contrat (voir encadré).
Règles générales et spécifiques
Ces règles d’entretien, quelles sont-elles ? Certaines sont communes à toutes les typologies de toiture. D’autres sont spécifiques à telle ou telle fonction, avec à chaque fois un pré requis : elles auront été prises en compte dès la phase conception de l’ouvrage. Auront été ainsi pensés en amont la facilité d’accès aux points singuliers, le choix de matériaux adaptés et durables, les dispositifs de sécurité adéquats…
De manière générale, au minimum une fois par an, les ouvrages d’étanchéité visibles seront examinés, les ouvrages complémentaires inspectés (acrotères, lanterneaux, zinguerie…), les feuilles mortes, les mousses, les herbes et tous détritus enlevés et les entrées d’eaux pluviales (EEP) vérifiées et nettoyées. « Avec les relevés, ces dernières constituent l’un des principaux points faibles des toitures-terrasses », souligne Jérôme Peuch, directeur de Smac Assistance Service. Leur obstruction empêche l’eau d’être évacuée provoquant des débordements sur toiture béton et, plus grave, une potentielle déformation des bacs et d’autres désordres structurels sur élément porteur en acier.
Lorsque la destination et l’usage de la toiture l’exigent, des règles complémentaires s’appliquent. Ainsi, les terrasses techniques, photovoltaïques ou solaires sont exposées au passage régulier d’intervenants affectés à la maintenance des équipements. Les chutes d’outils, les piétinements répétés, les manipulations inadaptées voire le passage d’engins constituent autant de risque pour l’intégrité du complexe. C’est notamment pour limiter les sollicitations sur le système qu’il est obligatoire de prévoir un chemin de circulation et que le stockage de matériel est interdit. Sur terrasses accessibles, les protections d’étanchéité (revêtements en dalles sur plots, platelage bois, dalle béton) seront nettoyées, recalées si nécessaire, tout comme, le cas échéant, les joints périphériques et de fractionnement.
Toitures végétalisées
(c) Alex Meaux / Soprema Entreprises
L'entretien des toitures-terrasses végétalisées est décrit dans les Règles professionnelles pour la conception et la réalisation des terrasses et toitures végétalisées.
Les toitures-terrasses végétalisées sont les plus exigeantes en la matière. Elles sont en effet non seulement complexes tout en intégrant des contraintes de satisfaction visuelle. Les préconisations d’entretien ont été formalisées pour la première fois en 2007 avec la parution des premières Règles professionnelles (RP) pour la conception et la réalisation des terrasses et toitures végétalisées. Reprises et complétées au fur et à mesure des versions, elles visent à la fois l’entretien de l’étanchéité, de la végétalisation et des zones stériles. Elles distinguent trois périodes. Le parachèvement (intégrées au marché de travaux, il relève des attributions de l’entreprise titulaire du lot) est compris entre l’installation de la végétalisation et la réception de l’ouvrage. Suit la période de confortement, qui s’étale jusqu’à une couverture par la végétation d’au moins 80 % de la terrasse, puis d’entretien courant, pour laquelle la responsabilité de l’entretien est transférée au maître d’ouvrage. Un contrat d’entretien unique s’impose alors avec comme objectif d’obtenir et de conserver un taux de couverture végétale supérieur à 80 %, de maîtriser le développement des adventices et d’assurer le développement durable de la végétation. Parmi les tâches à accomplir par l’étancheur : l’enlèvement des déchets, la remise en place des parties de substrat pouvant avoir été déplacées, le désherbage et la fertilisation (avec des produits adaptés), la vérification du système d’arrosage… à raison de deux visites annuelles, quatre lorsque la végétalisation est semi-intensive. Enfin, « tout point de la terrasse devra être situé à moins de 30 m d’un point d’eau qui sera maintenu en état de fonctionnement pendant la durée de vie de l’ouvrage sauf en période hivernale », précisent les RP.
Respecter l’ensemble des règles préconisées dans les documents de référence est une condition sine qua non à la longévité des toitures-terrasses. L’étancheur est le plus à même de respecter tous ces points de vigilance et connaître les bonnes pratiques en matière d’interventions sur un toit, en particulier les dispositions de mise en sécurité propres au travail en hauteur.
Le contrat d’entretien
Les NF DTU de la série 43 recommandent la signature d’un contrat d’entretien entre l’entreprise d’étanchéité et le maître d’ouvrage ou ses ayants droit. Ils précisent également quels sont les principaux points de vigilance à contrôler lors des visites annuelles comme la vérification des relevés, le nettoyage des entrées d’eaux pluviales ou l’enlèvement éventuel de végétaux et autres détritus.
Il sera proposé dès la réception des travaux ou conjointement à l’envoi de la facture. La Chambre syndicale française de l’étanchéité (CSFE) met à disposition de ses adhérents des exemples de contrat type en fonction de la typologie et de l’usage de la toiture. Ils décrivent la nature des prestations à réaliser ou à exclure, leur périodicité, les mesures à prendre pour garantir une intervention en toute sécurité, la durée du contrat, les conditions de prix et de paiement. Chaque visite fait l’objet d’un rapport technique sur les constats et les réparations réalisées.
Les principales règles d’entretien des toitures-terrasses selon les NF DTU de la série 43
Selon les NF DTU de la série 43, l’entretien d’une toiture-terrasse comporte au moins les opérations suivantes :
- l’examen complet des ouvrages d’étanchéité visibles ;
- l’inspection de tous les ouvrages complémentaires visibles sur la toiture notamment les souches, édicules, lanterneaux, acrotères, ventilations, zinguerie, bandeaux… ;
- la vérification des relevés d’étanchéité ;
- la vérification et le nettoyage des entrées d’eaux pluviales et trop-pleins ;
- l’enlèvement des mousses, des herbes et toute autre végétation ;
- l’enlèvement des boues et limons sur revêtements autoprotégés apparents ;
- l’enlèvement des détritus et menus objets ;
- la remise en ordre éventuelle des protections meubles.
Trois questions à Jérôme Peuch, directeur de Smac Assistance Service
Étanchéité.Info Quel est le rôle des entreprises en matière d’entretien et de maintenance des toitures-terrasses ?
Jérôme Peuch L’entreprise doit être force de proposition. C’est elle qui dispose de l’expertise et du savoir-faire car l’entretien d’une toiture ne se limite pas à son nettoyage. L’intervenant doit être en capacité de traiter les désordres constatés sur la toiture mais aussi de détecter et d’anticiper d’éventuels désordres futurs au droit des points singuliers. Il s’agit, pour les principaux, des relevés, des jonctions et raccords d’étanchéité ainsi que des chéneaux et des entrées d’eaux pluviales. Chez Smac, nos équipes dédiées à l’entretien maintenance sont spécifiquement formées à cet accompagnement. À travers leur expertise et leurs préconisations elles aident nos clients à pérenniser leur toiture dans la durée.
E.I. La signature d’un contrat d’entretien est-elle systématique ?
J.-P. Nous proposons toujours un contrat d’entretien au client dont la périodicité de renouvellement est convenue avec lui. Il est adapté à ses besoins, ses capacités financières, la nature et l’état des toitures constituant son patrimoine immobilier. À l’issue de chaque passage, nous leur fournissons un rapport de visite complet reconnu par les assurances. Si nécessaire, il est assorti de nos préconisations de travaux lui permettant de gérer son budget et d’anticiper des réparations afin de se prémunir de sinistres ultérieurs.
E.I. Les clients ont-ils conscience de l’importance de ce contrat ?
J.-P. Les maîtres d’ouvrage gestionnaires de parc, qu’ils soient publics ou privés, connaissent les risques techniques et financiers encourus si leurs toitures ne sont pas entretenues régulièrement. Certains ont d’ailleurs rédigé des cahiers des charges définissant les règles d’entretien applicables à leurs toitures. Pour les copropriétés, le processus de décision est évidemment plus long mais elles comprennent rapidement qu’identifier et résoudre les problèmes tôt, avant qu’ils ne prennent trop d’ampleur, permet au final de réaliser des économies. Les dommages en toiture peuvent avoir des conséquences très lourdes qui peuvent se chiffrer en dizaines voire centaines de milliers d’euros. Rapporté aux quelques milliers d’euros du contrat d’entretien, le calcul est vite fait.