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Deux entrepreneurs du secteur de l'étanchéité témoignent de la réalité de terrain : arrêt ou poursuite des chantiers ? Dans quelles conditions ? Quelles conséquences pour l'entreprise ? Pour le moment, en l'absence de réponses nettes et précises des pouvoirs publics, la sécurité des salariés prime et ils sont appelés à rester chez eux.

Olivier Comperat dirigeant de l'entreprise Sapeb

"La situation est très confuse. La poursuite ou l'arrêt des chantiers ne dépend pas que de nous. Nous intervenons presqu'exclusivement sur des chantiers de constructions neuves et les choix des entreprises de gros oeuvre peuvent conditionner les nôtres. Nous dépendons également des approvisionnements et donc des activités des distributeurs. Enfin, et surtout, il faut que nous soyons en mesure de mettre en sécurité nos équipes. Il faut que ces trois conditions soient réunies.

A ce jour, sur l'ensemble de nos interventions, seul un chantier est encore ouvert partiellement. Mais nos collaborateurs, eux, n'y sont pas retournés pour des raisons de sécurité. Nous ne souhaitons pas prendre cette responsabilité vis-à-vis de nos équipes. Et ce serait contraire aux dernières instructions conjointes du gouvernement et de la FFB. Nous sommes en train de mettre en place l'activité partielle dans l'entreprise, nous n'avons pas le choix. Etant spécialisés dans le neuf, nous faisons appel à la sous-traitance, ce qui permettra d'amortir en partie l'impact financier qui ne manquera pas d'arriver. Pour les entreprises avec le personnel plus intégré, c'est ça sera plus critique  spécialisés dans le neuf, nous faisons beaucoup appel à la sous-traitance. Pour les entreprises avec le personnel plus intégré, ça sera plus critique. 

Nous attendons des décisions claires et communes des pouvoirs publics et des organisations professionnelles. Mais la question cruciale, c'est celle du masquene serait-ce que dans les véhicules. On ne peut pas reprendre si nos équipes ne peuvent pas en porter. Et on sait qu'on n'en aura pas. Sans parler des problèmes de cantonnement que ça soit le vestiaire, les wc, au déjeuner : pour les chasses d'eau, les robinets d'eau, le four à micro-ondes, il faudrait quelqu'un pour nettoyer derrière chaque compagnon ? Quand on regarde dans le détail, c'est beaucoup plus compliqué qu'il n'y parait. Je pense que ça n'évoluera pas dans le bon sens. D'ailleurs, quand on regarde ce qu'il se passe en Italie qui vient d'interdire les activités non essentielles et d'arrêter les chantiers, ça sera surement une bonne chose. J'espère que les mesures vont aller vers un confinement beaucoup plus strict afin de mettre fin à cette situation le plus vite possible."

Gérald Faure, dirigeant de SGF Etanchéité 

"On ne peut pas nous expliquer que d'un côté les particuliers doivent rester chez eux et de l'autre nos équipes doivent aller travailler sur les chantiers. Elles ne sont pas immunisées par leurs EPI. Nos salariés sont aussi des particuliers. Nous leur avons donc dit de rester chez eux. Les personnels d'encadrement viennent au bureau à tour de rôle, à 4 maximum en même temps, pour gagner un peu de temps. Mais si le confinement est prolongé, comme il est probable, on organisera une permanence tournante au bureau d'une demi-journée par personne pour celles qui le souhaitent. Elles seront payées les jours de travail et au chômage partiel les autres. L'idée est de rattraper le retard et de préparer un peu les futurs chantiers. Mais nous n'avons pas suffisamment de travail pour être au bureau en permanence. 

A ce jour, concernant les chantiers sur lesquels nous intervenons, certains maîtres d'ouvrage ont eu la sagesse de les interrompre mais ce n'est pas le cas pour tous. Avec le risque pour nous d'être mis en défaut sur des retards de planning.

D'autre part, le gouvernement a demandé aux négoces de réouvrir. Ne faudrait-il pas plutôt que nous ayons des garanties d'être payés par les majors de la promotion ? En effet, la chaîne, elle est là. Il faut a minima que les maîtres d'ouvrage nous payent pour les factures présentées au moins avant le Covid-19. De notre côté nous avons rémunéré les sous-traitants et les ouvriers. Mais si nous ne recevons pas les réglements de nos maîtres d'ouvrage, nous ne pourrons pas payer les industriels. Or, aujourd'hui, il ne semble pas y avoir de mesure dans ce sens.

L'accord annoncé samedi entre gouvernement et organisations professionnelles est très confus. Si demain on me dit que des dispositions pour travailler parfaitement en sécurité sont mises en place (masque, distance de sécurité..) pourquoi pas reprendre le travail. Mais on ne peut pas nous demander à nous, entrepreneurs, de trouver les bons dispositifs pour ne pas contaminer ni être contaminés."