Première interview de notre nouvelle série dédiée cette semaine aux industriels de l'étanchéité. Aujourd'hui, Benoît Steiner, directeur général d'Iko SAS et de Roofmart. 

Etanchéité.Info Quelles mesures ont été mises en place dans vos usines et votre réseau de distribution ?

Benoît Steiner Comme beaucoup d’industriels, nous avons interrompu la production de notre usine normande mardi 17 mars au lendemain de l’intervention de Mr Macron. L’inquiétude du personnel de l’usine était palpable, d'autant plus que nous avions suivi, tout au long de la journée, les annonces de fermeture tempotaire des grands groupes. De son côté, la Fédération du négoce du bois et des matériaux de construction  (FNBM) a communiqué rapidement sur les mesures à prendre dans les négoces, mesures que nous avons appliquées immédiatement. Pour la plupart, et notamment les gestes barrières, tout le personnel les avait d'ailleurs déjà adoptées depuis le 28 février. Nous avons réorganisé nos process logistiques et le télétravail a été privilégié pour le personnel administratif Dans les magasins Roofmart, nous avions également limité l’accès dans les showroom dès le 13 mars. Le 17, les mesures de prévention ont été renforcées avec par exemple, une forte réduction des effectifs présents et un fonctionnement exclusivement sur le mode "drive".  

Il y a quinze jours, la moitié de nos dépôts étaient fermés. En début de semaine dernière, une grande majorité d'entre eux a réouvert car un service minimum pouvait être assuré en toute sécurité par nos équipes. En effet, à la différence des entreprises, il est beaucoup plus simple d’organiser l’activité d’un industriel ou d’un négoce.

E.I. Comment vos collaborateurs ont-ils réagi ? 

B.S. Bien sûr aussi, tous ne réagissent pas de la même façon face au risque et nous avons pris grand soin de ne pas imposer et d’écouter nos équipes. Une cellule de crise est en place et nous communiquons étroitement avec le CSE. Les communiqués relayés par la FFB, la FNBM  et la CSFE nous sont d’une grande utilité pour suivre l’évolution des mesures gouvernementales et la façon de les appliquer chez nous et de communiquer en interne. Evidemment beaucoup d’interrogations restent en suspens sur la prise en charge des arrêts maladie, des arrêts garde d’enfants, de l’activité partielle.

L'autre grand sujet c'est évidemment la mise à disposition des EPI. Nous déployons également beaucoup d’énergie à en rechercher à la fois pour équiper nos salariés et pouvoir fournir nos clients. Malheureusement sans succès pour l’instant...

E.I. Et économiquement, qu'en est-il de l'activité ? 

B.S. Elle s’est littéralement effondrée le 17 mars, avec le report de quasiment toutes les livraisons. Il a fallu gérer les camions déjà sur la route et c’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles nous avons maintenu un effectif minimum dans nos dépôts. Une petite amélioration a été observée depuis le début de la semaine dernière, mais elle demeure très timide. Les perspectives de reprise restent très incertaines. Beaucoup d’inquiétudes subsistent pour nos clients et globalement sur les conditions de reprise du secteur du bâtiment, nous rendant difficiles les prévisions des semaines à venir. Heureusement, la sortie du guide de recommandations Covid 19 de l’OPPBTP est un espoir pour toute notre profession et les prochains jours nous permettront d’y voir plus clair sur ce que nous pourrons apporter aux entreprises.

E.I. Quelle lecture faites-vous de ce guide ?

B.S. Tout le monde l’attendait avec impatience. Il donne en effet des clés d’organisation pour remettre en marche les chantiers. Evidemment beaucoup de mesures sont contraignantes, mais elles sont certainement indispensables à la sécurité du personnel.

J’ai noté la liste des produits recommandés sur chantier : certains seront faciles à trouver, pour d’autres, nous cherchons des solutions pour nous approvisionner. Je pense évidemment ici aux masques. Attention aux offres alléchantes, il y a beaucoup d’arnaques actuellement.

Quant aux futurs responsables Covid 19 designés dans chaque entreprise, nous nous mettons leur disposition pour aider à sourcer les produits.

E.I. La chute des prix du pétrole a-t-elle un impact sur votre activité de production ? 

B.S. Elle ne nous touche pas directement : nous achetons du bitume et pas du pétrole. Les raffineries sont frappées elles aussi par l’effondrement du marché. Si elles ne trouvent pas de débouchés pour les produits de base comme l’essence, il y en aura encore moins pour les bitumes. Elles réduiront, voire arrêteront elles aussi la production. Pas d’inquiétude toutefois, nous sortons de l’hiver et les stocks sont à des niveaux élevés. Nous sommes en mesure de relancer la production de l’usine très rapidement en quelques jours.

E.I. Quelle est la situation dans les autres pays européens ? 

B.S. Notre groupe opère en Belgique et au Royaume Uni où la situation est sensiblement la même. Seule les Pays-Bas, qui n’ont pas pris de mesures de confinement, reste dans une activité quasi-normale.