Comment évolue la situation au sein des entreprises d'étanchéité ? Nous les avions interrogées il y a trois semaines pour en savoir plus sur ce qu'il se passait alors sur le terrain. Depuis le guide de préconisations de l'OPPBTP est paru. L'activité a-t-elle repris ? Nous sommes retournés les voir pour leur poser la question. Aujourd'hui Franck Davoine, dirigeant de Smac.

"Dès l'annonce du confinement, nous avons réfléchi aux règles qu'il fallait mettre en place pour permettre une reprise des chantiers sécurisée pour nos équipes. En effet, la santé et la sécurité sont les valeurs n°1 chez Smac. Ce travail, réalisé en parallèle de celui de l'OPPBTP, a impliqué dès le départ les chefs d'agence et nos compagnons les plus expérimentés (les compagnons de l'Arche). A ce moment-là, les masques étaient introuvables. C'est pourquoi nous avons identifié très tôt l'ensemble des interventions sur lesquelles les collaborateurs peuvent être seul ou, à défaut, à plus d'un mètre les uns des autres. En étanchéité, ces cas de figure sont assez courants mais en bardage, sans masque, c'est beaucoup plus compliqué, ne serait-ce que sur les nacelles où il faut souvent être deux pour fixer des pièces volumineuses et lourdes. Respecter une distance d'un mètre sur ces équipements n'est pas tout le temps envisageable. C'est pourquoi nous avons également constitué des stocks d'EPI dès que cela a été possible : gel hydroalcoolique, lingettes et bien sûr masques que nous avons commandés très tôt en Chine. Nous les avons reçus début avril et répartis sur notre cinquantaine de sites en France. Pour suppléer au dysfonctionnement des réseaux de livraison, nous avons créé notre propre réseau de distribution interne. 

Le guide : un dénominateur commun

Nous disposons donc des prérequis pour un retour sur chantier depuis cette date mais dans les faits, nous n'avons pas vraiment repris de manière significative. La preuve : nous sommes passé de 1 % à 8 % de chantiers ouverts. Nos donneurs d’ordre ne sont pas encore tous prêts à organiser la continuité de l’activité et l’aspect émotionnel l’emporte souvent. Les comportements ne sont pas forcément homogènes face à cette crise et cela influe sur les décisions, quelle que soit la taille du chantier. C'est aussi pour cela que la reprise a encore du mal à décoller. D'où l'importance de la parution du guide. Il doit faire évoluer la situation, créer un déclic en démontrant qu'une reprise est effectivement possible si l'on respecte certaines règles.En offrant une référence commune à la profession, il définit le cadre qui manquait jusqu'alors. Il constitue donc une pièce essentielle mais néanmoins encore insuffisante pour relancer l'activité. Le travail de communication et d'écoute vis-à-vis de nos équipes et de toutes les parties prenantes d'un chantier reste considérable et est une condition déterminante de la reprise d’activité. 

Formations internes

Nous disposons en interne de responsables Qualité sécurité environnement (QSE) qui, grâce à leur travail d'anticipation, ont appliqué très tôt les règles du guide à nos métiers et se les sont appropriées. Nous avons ainsi pu former des formateurs qui vont ensuite accompagner l'ensemble des conducteurs de travaux, des compagnons et de manière générale tous les collaborateurs dans la prise en main de ces mesures. Ce travail est en cours et va prendre du temps car il faut acquérir de nouveaux réflexes. 

Des règles au cas par cas

Nos conducteurs de travaux vont ensuite avoir la charge d'échanger avec tous les partenaires : les maîtres d'ouvrage, les architectes, les coordonnateurs SPS, les maîtres d'oeuvre, les autres corps d'état en cas de coactivité, les fournisseurs, les sous-traitants... afin que l'ensemble des acteurs d'un chantier définissent conjointement les protocoles à suivre. Cette étape aussi va être longue, sachant que chacun a une appréhension différente de la situation. Il va notamment falloir rassurer, prendre le temps d'expliquer pour décliner les procédures selon les spécificités propres de chaque chantier. Les configurations en termes de sanitaires, de réfectoires, d'arrivées de chantier varient considérablement d'un site à l'autre. Le guide reste la référence mais, de notre côté, nous avons également acquis une expertise en la matière pour pouvoir proposer des solutions. 

Solidarité

Je voulais encore une fois remercier les collaborateurs et les représentants du personnel de notre entreprise. Ils ont fait preuve de beaucoup de lucidité et j'ai pu mesurer leur implication, leur responsabilité et leur solidarité. Nous sommes plus que conscients que pour les personnes en activité partielle, le confinement est éprouvant et que la baisse de salaire suscite des inquiétudes. Pour eux aussi, la reprise de leur activité est importante. Pour montrer ma solidarité, j'ai moi-même réduit mon salaire du mois d'avril dans les mêmes proportions. Les membres de la direction ont également fait don de leurs congés." 

À lire aussi

Retrouver le précédent témoignage de Franck Davoine, publié le 25 mars dernier en cliquant ici.